Les fils des hommes presse écrite

Le coup de coeur de M, le magazine du monde 28 06 2014M le magazine du Monde 28 06 14 / Les fils des hommes Coup de coeur

http://www.jeanjacquesdelfour.fr   Dimanche 17 août 2014

Compagnie Action d’espace, Les fils des hommes : comment théâtraliser l’histoire douloureuse

La guerre coloniale, maquillée en opération de police, alignant massacres et tortures, est un cauchemar pour ceux qui l’on vécue directement mais aussi pour leurs enfants. La guerre d’Algérie fut, côté français, une sale guerre, injuste et illégitime. Tandis que, côté algérien, elle était une guerre juste et même légitimée par l’idéologie des agresseurs (les Droits de l’homme, la souveraineté populaire, etc.). Les paras tortionnaires, que décrit Henri Alleg dans La question, 1957, se référaient explicitement à la torture en Indochine ou même à la Gestapo. La violence directe des « événements » d’Algérie, comme disait la censure d’État, occulte, voire éclipse complètement la violence vécue par les fils des acteurs direct de la guerre coloniale. Si les traumatismes les plus durs affectent ces derniers, il appartient à leurs enfants de trouver une voix pour dire leur guerre d’Algérie à eux, dont ils souffrent sans la connaître, peut-être plus violemment du fait du caractère indirect. Comme les guerres sont toujours atroces, la part du refoulement et du déni est immense. Celle-ci augmente à la génération suivante. C’est ce poids exorbitant du trauma non reconnu qui affecte les fils des acteurs de la guerre. La guerre est passée sous silence parce qu’horrible et parce qu’elle est le fait des pères. Les fils n’ont aucun droit à parler d’une guerre qu’ils n’ont pas faite mais qui, en revanche, les a faits, les a altérés, les a transformés. L’histoire officielle n’en veut pas : car il faut croire que la violence passée disparaît, une fois accomplie. Place au présent ; et que se taisent ceux qui ont vraiment vécu d’indicibles horreurs ! L’histoire française n’en veut pas pour une deuxième raison : la honte de la torture, la honte d’avoir abandonné les Harkis, la honte d’avoir relégué dans des ghettos les populations d’immigrés qui ont reconstruit la France contemporaine. De ces caractères dérive l’ensemble des choix esthétiques. Le recueil de témoignages relativement bruts auprès des fils concernés, en amont du spectacle, répond au vide historiographique officiel. La fabrication d’un espace étroit mais ouvert, où les comédiens soient entourés par les spectateurs, répond à la solitude des fils. La recherche d’un appui moral (donc symbolisé par les corps chorégraphiques) répond aux abandons symboliques et physiques qu’ils ont subis. La parole, crue, en face à face avec les spectateurs, répond au fait habituel de détourner les yeux quand ces histoires-là viennent sur le tapis. La prise de parole singulière, prudente et puissante, répond à la censure multiforme. Un cube rouge, pierre tombale errante, sang des victimes figé en une pierre d’achoppement, pavé de la contestation, brique du mur des lamentations à construire, caillot de sang qui ralentit la circulation, pierre sarcophage qui ronge les corps et les âmes des fils de la guerre d’Algérie, rocher sisyphéen sans cesse à remuer, parpaing inerte de l’oubli, ce cube rouge est un Hermès : un truc rusé qui effectue le lien entre l’Histoire, les pères, les fils, les témoins, les spectateurs. Ainsi peut circuler l’émotion du témoignage, l’impression grisante et grave d’être en communication avec l’Histoire, celle avec une grande hache, comme dit George Perec dans W ou le souvenir d’enfance. Jean-Jacques Delfour. Vu lors du 29e Festival international de Théâtre de Rue, à Aurillac, 20-23 août 2014.

La Voix du Cantal / Aout 2014

la voix du Cantal 08 2014

L’Union du Cantal 21 mai 2014

Les fils des hommes (Cie Action d’Espace), ces “Harkis, Pieds noirs, Appelés ou Fellagas”, tous pris dans le conflit algérien ; la vie de Vsevolod Meyerhold (Doctor Daperttuto, Teatro del silencio), l’un des plus grands metteurs en scène russe du XXe siècle assassiné par le pouvoir stalinien… : comment croire encore, à l’évocation des spectacles qui seront proposés cet été dans le cadre de la 29e édition du festival aurillacois, que le théâtre de rue n’a pas toute sa place dans l’introspection des maux et tourments de nos sociétés ? Comment douter encore de son utilité tant il renvoie à travers ces conflits du passé à un présent tout aussi menaçant pour la paix et la liberté des peuples ?……« Les fils des hommes, un spectacle que la profession a encensé, c’est sorti comme ça, comme une jolie fleur » selon J.M. Songy.

  • photo de JM Coubart
    photo de JM Coubar
  • STRADDA     / 26 / octobre 2012

La guerre d’Algérie en fait couler, de l’encre, en ce cinquantenaire de l’indépendance où la chape de plomb commence enfin à s’ébrécher.  Pas de prétention didactique chez François Rascalou, mais le prisme de la mémoire intime. C’est la lecture du livre « Des hommes » 1, roman polyphonique de Laurent Mauvignier sur la mémoire des appelés, qui fait naître chez le danseur le besoin d’éclairer un pan de son histoire familiale.

La tragédie des fils. « J’ai été saisi de façon chorégraphique   par  l’écriture   de  Mauvignier : ce mouvement qui roule et qui permet de brouiller  les identités, faisant parler plusieurs personnes à travers une seule voix de tête. L’histoire de la guerre ne m’intéresse pas. Ce  qui me troublait,  c’était mon silence à moi, cette tragédie commune  à nous, les fils. »        « Les Fils  des hommes » s’attelle  donc à la génération suivante,  celle des enfants de combattants. Lui-même fils d’appelé,  le danseur a multiplié les interlocuteurs pour nourrir son propos : « Au-delà de l’Algérie,  c’est le fantôme  de l’empire et des colonies qui traîne, et qui empoisonne  les rapports  humains. Qu’une  personne de leur famille ait été membre  de l’OAS ou du FLN, harki, pied rouge ou pied noir, torturé ou été torturé,  tous les fils qui parlent à travers moi dans le spectacle arrivent  au monde  avec ce parachute, auquel ils s’accrochent. »      Fi de parachute, il s’agit ici d’un massif cube de 15 kilos, aussi énigmatique qu’imposant : tour à tour  estrad, appui ou échelle, mais surtout fardeau quotidien dont la surface lisse empêche toute prise, et qui pèse de tout son poids sur la construction d’un être. « Le nerf intérieur, c’est le rapport  du fils au père. Des gens me racontaient beaucoup  de choses sur leur père, et puis me disaient tout à coup qu’ils ne savaient rien. L’imaginaire, les fantasmes viennent combler les silences. »

Désarmante douceur. Adepte d’une danse performative pratiquée parfois hors salle, François Rascalou cherche dans l’espace public la brèche où s’infiltrer. « Des trous d’air aléatoires dans l’écriture me permettent de jouer avec les lignes de la ville, de trouver  les possibilités de coincer le corps dans l’architecture. » La douceur de ton avec laquelle s’égrainent des propos souvent violents, c’est la sienne dans la vie. Une désarmante candeur empreinte de gravité, énoncée parfois les yeux dans les yeux d’un spectateur pris à témoin : « J’ai dans la tête les gens qui m’ont parlé, je teinte ma diction de leur verbe, leur voix. Mais je fais attention de ne pas boutonner  la veste étriquée d’un personnage, pour tendre à l’universalité. » D’Oran au quartier de la Paillade de Montpellier, en passant par le marché de Chalon-sur- Saône, le monologue fait ricochet dans le public, trouvant les mots justes pour commencer à exorciser ce traumatisme collectif encore récent, entre mutisme destructeur et vérités souvent innommables. Quand, à la fin, Rascalou nous laisse son fardeau pour en repartir allégé, à chacun d’en faire bon usage.  ●

JULIE  BORDENAVE

1. « Des hommes », de Laurent Mauvignier,  Editions de Minuit, 2009. Vu à Chalon dans la rue, Chalon-sur-Saône (71). Création en février 2012, à l’institut français d’oran, Algérie.

 La GAZETTE de Montpellier n°1273 – 8 au 14 novembre 2012 . Les fils des hommes : l’un des meilleurs spectacles de rue 2012. Pour concevoir le solo Les fils des hommes, le montpelliérain François Rascalou s’est inspiré de sa propre histoire. Son père, appelé, a combattu pendant la guerre d’Algérie. Le chorégraphe a recueilli des témoignages des fils de tous bords : harkis, appelés, moudjahids, pieds-noirs… unis au-delà de l’histoire par une même douleur face au silence de leurs pères. Inspiré par la lecture du roman Des hommes, de Laurent Mauvignier, et présenté pour la première fois à Oran en mars 2012 suite à une résidence dans la ville de l’ouest algérien, ce spectacle poétique est une véritable performance évoluant en lien étroit avec l’espace dans lequel il est proposé. Dans la peau d’un « travailleur de l’imaginaire » pendant 45 minutes, François Rascalou pousse un gros cube « lourd, rouge, bruyant, assez solide, qui s’effrite aussi. Sans jamais dire qui je suis, je passe d’un fils à l’autre. » « Ce spectacle était une nécessité personnelle, explique t-il, mais aussi une révolte face à l’ambiance un peu nostalgique et raciste qui, cinquante ans après, règne et m’insupporte. » l’artiste prévient : « je ne prends pas partie. Il n’y a aucun objet pédagogique historique. Je raconte des histoires d’hommes, poétiques. Des émotions. »

Un spectacle appelé à un long succès.  Lucile Pinault

  • MIDI LIBRE           11 novembre 2012

ON A VU “Les fils des hommes”, mémoire sensible sur la guerre d’Algérie.

D’abord on entend le bruit du cube rouge que le chorégraphe François Rascalou fait rouler avec fracas sur le bitume. Un objet qu’il n’aura de cesse de transporter, faire grimper le long d’un mur ou abandonner un temps. Un cadeau, un fardeau, qui symbolise la mémoire des fils de ceux qui ont fait la guerre d’Algérie, quel que soit leur camp. C’est cette filiation douloureuse que le Montpelliérain raconte par bribes, entraînant le public à sa suite dans les rues. « Je travaille sur ma position de fils de la guerre d’Algérie », martèle-t-il, laissant souvent la place aux silences et aux gestes pour rendre plus fort le poids des mots. Un beau moment.

  • MICRO CASSANDRE Mardi 24 juillet 2012

Il n’y a pas qu’Avignon dans la vie! Mais aussi Châlon…

….. Avec « Les fils des hommes » , de François Rascalou, on ne rit plus. Mais ce spectacle est LA révélation du festival. François Rascalou danse et conte, conte « sa  » guerre d’Algérie de fils d’appelé, et toutes les guerres d’Algérie des fils d’appelés, des fils de pied noir, des fils du FLN, des fils de harki. Les non dits, les colères, les cris tus trop longtemps remontent à la surface. et se font chair. Ce mur du silence, c’est avec son corps qu’il l’affronte, corps encombré d’un cube rouge pour tout accessoire, boulet autant que boîte à secret. Corps qui se heurte aux encoignures, qui se faufile entre les passants, qui interpelle, qui sans cesse en déséquilibre reprend son appui, qui ose arracher l’espace public à sa routine, à l’entrée des magasins, dans le camion d’un forain. Une voix, un corps, un cube, et la tragédie est là: Rascalou, qui jouait en plein marché,  interrompt les flux de marchandises et de passant, les conversations, provoque, interpelle nos propres silences.    Et c’est bouleversant. Lors des « heures entre parenthèses » orchestrées par l’ubiquiste Pascal Le Brun Cordier, chaque spectateur y allait de son témoignage: ce vieux marchand algérien qui vient silencieusement serrer la main du danseur à la fin du récit, ce jeune happé à la sortie du supermarché qui ne décolle plus les yeux de la danse. Ce récit de mémoires incarné suspend le temps, défie l’indifférence, arrache la ville et ses habitants  à leurs « affaires ». Retenez ce nom et surveillez ses passages dans vos villes!…….

  • LE JOURNAL DE SAONE ET LOIRE 21 Juillet 2012

L’heure entre parenthèses. Un moment d’échanges, à vivre ce soir encore. Pour dézinguer ou encenser  le 21/07/2012

Depuis jeudi et jusqu’à aujourd’hui, la Rue des publics donne la parole aux festivaliers, pour un bénéfique partage d’expériences. Si l’heure entre parenthèses est utile pour éviter les spectacles qui ne sont pas de son goût, elle l’est aussi pour dénicher les bons plans. Jeudi soir, plusieurs spectacles ont ainsi été encensés par la « critique populaire », dont Hamlet  (Les Batteurs de Pavé), Macao et Cosmage  (par la Soupe compagnie),  Les fils des hommes (François Rascalou), Chalon à vendre (Cie du thé à la rue), ou encore ApartéS (Cie Singulière).  Un échange d’expériences, non  seulement  utile,  mais  qui  permet  aussi  «  de  construire  une  sorte  de  mémoire  collective  du  festival  », s’enthousiasme Pascal Le Brun-Cordier, professeur à la Sorbonne et animateur de L’heure entre parenthèses. « En parlant des spectacles, on arrive toujours à mieux les vivre et les ressentir ». 

  • LE JOURNAL DE SAONE ET LOIRE 19 Juillet 2012

 Action d’espace François-Rascalou La guerre d’Algérie, sous un autre angle Que représente donc ce singulier cube ? Si l’on est peu au fait des drames engendrés par la guerre d’Algérie, trouver un intérêt aux déambulations  de ce grand type, manipulant  un gros cube rouge sang et tenant des propos obscurs, peut tenir de la gageure. On est d’ailleurs vite tenté de quitter Les fils des hommes. Pour autant, on ne le fait pas. En effet, la fonction assignée à ce cube, que l’homme semble tantôt traîner comme un fardeau, tantôt poursuivre comme un fantôme lui échappant, nous en dissuade. S’agissait-il de nous faire comprendre  que, comme c’est le cas pour un cube, on ne saurait voir en même temps toutes les facettes d’un événement  historique tel que celui qui, des deux côtés de la Méditerranée, n’en finit pas de tourmenter nombre d’hommes ? Quoi qu’il en soit, on sait très vite qu’on a bien fait de rester.

  • Le Tadorne festivalier.net    Mardi 3 juillet 2012  Le blog des nouvelles articulations créatives

François Rascalou: un corps qui transmet la mémoire vive des hommes. …Trente minutes avant la performance annoncée de François Rascalou, je saute vite dans le tramway où un soleil écrasant sur Montpellier m’accueille à la station Saint Paul. Je traverse le parking à la recherche du spectacle, quand tout à coup, j’aperçois un homme, vêtu d’un tee-shirt jaune, poussant bruyamment un cube de bois rouge. Les couleurs ont toutes leur importance, car elles se révèleront plus tard comme un rubis cube, dans ce décor de galerie marchande à ciel ouvert. Pas de doute, nous sommes dans le sud…presque déjà en Algérie. Un groupe de personnes est assis à une terrasse, à l’ombre d’un pin. Autour, les habitants circulent, affairés avec leurs achats de pain, de viandes et autres denrées. D’autres flânent devant un thé à la menthe, mêlés aux spectateurs. Le danseur commence à déclamer son texte. Il nous parle de la guerre d’Algérie. De questionnements d’un fils sur le rôle de son père pendant cette période. Je repense au film « Méditerranées » d’Olivier Py…Nous le suivons dans ses déambulations, à l’ombre des coursives qui distribuent les commerces. François Rascalou danse et croise des habitants de tous âges. L’écoute vient surtout des hommes et des enfants, filles ou garçons. Nous sommes non seulement spectateur d’une oeuvre vivante, mais également observateur d’une vraie rencontre entre l’artiste, son texte, son corps, avec le public de l’instant, spontané. Des moments uniques se révèlent: un homme passe avec son fils apeuré qu’il rassure en évoquant une grande fontaine d’eau fraiche sur une des places de Constantine. La poésie spontanée de cet homme est un écho qui s’inscrit dans le jeu, en côte à côte avec l’artiste. Il venait acheter son pain quand, happé par un texte qui a réveillé sa mémoire, il a transmis ses souvenirs à cet enfant. J’aimerai connaître l’après, quand ils sont rentrés chez eux….Que se sont-ils dit? En voyant le danseur rentrer dans la boucherie,  bouger ses bras, son corps et passer derrière le comptoir avec les bouchers, un autre homme dit : »Mais qu’est ce que c’est que ce délire?« . J’ose lui répondre: «Oui, c’est un délire.  Regardez et ensuite vous aurez votre propre lecture; vous verrez« . Ce spectateur réactif est resté dans le parcours, silencieux, le regard attentif tandis que d’autres rient, amusés, évoquant de ce qu’ils voient.  Tout à coup, ce petit centre commercial devient un lieu de convivialité et de co-création.     La chorégraphie s’harmonise spontanément avec ces promeneurs du dimanche. Des hommes adossés contre le mur entre le danseur, se distancent au même moment, à gauche et à droite. J’ai l’impression que le texte les fait réagir et que l’éloignement leur est nécessaire. François  Rascalou exprime le souvenir des cauchemars d’enfants, qui durent depuis trente ans; cela leur est-il insupportable?…La puissance de son texte, bâti sur des témoignages qu’il a collectés, donne à cette performance un caractère unique. En fusion totale  avec ce public impromptu, l’interaction rayonne lors de ce rendez-vous où l’écoute, le souvenir, la curiosité, l’émotion jusqu’aux larmes jalonnent son parcours. Le danseur puise dans ce partenariat avec le public, le levier des mots d’une mémoire collective ainsi que son rôle d’acteur.…….Sylvie Lefrere- De Vendart vers le Tadorne. 

  • LE MIDI LIBRE           29 mars 2012

Saint-Christol Scènes de rue et cinéma pour une soirée de fête Samedi dernier, une soirée en trois temps était animée tout d’abord par François Rascalou, qui a conduit le public à sa suite, accompagné de son mythique cube, à travers les rues du village. Un leitmotiv évocateur dans son texte : « J’ai tiré un trait dessus… Longtemps, j’ai refusé d’avoir accepté d’avoir vu ça. »  Provocateur, les 120 personnes présentes, ne peuvent lui résister, adultes ou enfants, lorsqu’il les invite à participer à sa chorégraphie, souvent acrobatique, le tout émaillé de temps de silence provoquant l’émotion, pour se terminer par de longs applaudissements.

  •  Midi Libre           24 mars 2012

Préparant le spectacle itinérant « Les fils des hommes- L’Algérie en mémoire » qu’il présentera samedi 24 mars, à 18 h, dans les rues du village, dans le cadre du Cinéma Méditerranéen du Pays de Lunel, François Rascalou était invité par l’association Livre et Culture à faire partager la genèse de son œuvre. Il le fit d’un manière très intime, avec beaucoup de simplicité et d’émotion. La lecture du roman Des hommes de Laurent Mauvignier a constitué le détonateur de sa création chorégraphique, lui donnant envie de monter un spectacle de la rue, plutôt que dans une salle. Rencontres avec des pieds noirs, avec son père qui a vécu cette guerre, avec ‘Les fils de la guerre’, les harkis, les moudjahids, des déplacements nombreux, jusqu’à Oran, de tout cela est née l’idée d’un homme seul, dans la rue, avec un cube qu’il traine partout, ‘Comme une mémoire encombrante’.

  • Le MIDI LIBRE 19 mars 2012

Guerre d’Algérie :Rascalou chorégraphie la parole des fils. Création.

L’artiste montpelliérain récolte des souvenirs d’enfants d’engagés des deux rives pour les mettre en scène. François Rascalou, le chorégraphe montpelliérain, revient  d’Algérie, où il a finalisé son spectacle, Les fils des hommes. Joué en sortie de chantier quatre fois puis en avant-première àOran (dans la rue et dans un lycée), Les fils des hommes est le fruit d’un travail sur et avec les héritiers d’anciens combattants de la guerre d’Algérie. «Des fils de Français appelés, comme mon père, et des fils de harkis, de pieds-noirs, des fils  de moudjahidine »,explique François Rascalou, qui recueille des paroles depuis deux ans. Après s’être «rendu compte que, si mon père n’avait jamais parlé de cette guerre, moi, je ne lui avais jamais posé de questions. » Le déclic s’est fait quand il s’est plongé dans Des hommes, de Laurent Mauvignier, «un roman d’une écriture chorégraphique, qui roule et se rompt, avec perte des personnages et un lecteur toujours à se raccrocher aux branches ». Secoué par cette lecture qui «remet en question le silence »,chape de plomb sur les événements, Rascalou note les souvenirs d’héritiers qui «fantasment et s’inventent un papa héros ou font le lien entre guerre et rapport àl’autre ». Au fil des mots, la quête révèle une trame de spectacle à Rascalou, qui entre en résidence àl’Usine de Toulouse (Centre National d’arts de la rue) puis à l’Ateline, lieux de fabrique du Languedoc-Roussillon, pour éprouver la mise en forme du projet, avant de le «passer au questionnement » de ses pairs: Pierre Pilate (Cie 1Watt), Didier Taudière (CIA) et Laure Terrier, chorégraphe de la Cie J.-Simone… Et de partir en Algérie, grâce àl’Institut français d’Oran. Ville où il continuera sa collecte de témoignages. En réalisant que si, «pour eux, la guerre d’Algérie, c’est loin -leur dernière guerre a20ans -, ils l’ont inscrite en mémoire et ça tient dans cette phrase d’un père àson fils :“Si tu bouges pas, t’es mort”. » En jouant dans la rue, Rascalou prend «le public à témoin, l’interpelle, physiquement ». L’homme est solaire, puissant. Les mots résonnent profond quand il raconte le marché d’Oran et le groupe de cinquante qui a repris avec lui encore et encore : «Longtemps, j’ai refusé d’avoir accepté d’avoir vu ça. »      Revenu à Montpellier, François Rascalou travaille la forme du show en continuant sa collecte de paroles de fils. Avec la rigueur du scientifique, il note et enregistre. En fin de semaine, il a d’ailleurs rendez-vous avec un fils de pieds-rouges, «un  Français qui s’est engagé côté Algérie ».Et à multiplier ainsi les regards introspectifs pour tisser le fil du spectacle évolutif, car en réaction avec le public, le chorégraphe révèle d’indicibles fêlures de l’être. CAMILLE-SOLVEIG FOL-

Ma vie avec tout le monde presse

« Ma vie avec tout le monde« , créée à la Chapelle, est une pièce de danse contemporaine… particulièrement actuelle. Et ce pour plusieurs raisons. Tout d’abord parce qu’elle parle de l’internet et plus précisément des réseaux sociaux. D’autre part parce qu’elle fait parler les danseurs. Et c’est bien la tendance la plus impressionnante de ces dernières années, cette propension des chorégraphes à parler et à faire parler . Il y a là trois danseuses et deux danseurs… qui sont en fait des internautes se présentant à nous et aux autres sous la forme d’avatars. Évidement, ils sont un petit peu « faux » et le jeu de la pièce consiste à nous faire osciller entre le « fake » et le « in the real life« . La plus grande force de la pièce est la qualité du texte, qu’on devine pioché puis travaillé par l’auteur à partir de sa propre expérience des réseaux sociaux. Un tel texte permet une construction scénaristique, ce qui a son importance, vu ce qu’il demande aux acteurs/danseurs. Ils ont, à la fois, à osciller dans leur pseudo-individualité et à suivre deux fils conducteurs. Celui du texte et celui de la danse. La deuxième force est la qualité du travail vocal des danseurs. Ils alternent la voix nue et la voix amplifiée. Et malgré cette difficulté technique, ils sont au top pour faire passer les nuances de leur alternance avatar/réalité tout en dansant.

Après avoir dit ça, on arrive à une histoire de goût. C’est un style de danse bien particulier, qui d’ailleurs est peut être encore en train de se chercher. Mais il me semble qu’on peut aimer la danse de Rascalou et cette qualité particulière, qui autorise beaucoup de mise en valeur individuelle de l’interprète. Et il me semble d’ailleurs que l’on doit l’aimer pour ça, parce qu’elle autorise ces éclairs des différents danseurs. Alors, là, dans ce cas, on a un petit quelque chose de différent de l’habitude Rascalou. On peut se demander si les soli ne sont pas aussi un moyen de mettre en lumière la folie intérieure des « personnages inhibés et avatarés » du système internet. On ne peut donc plus tout à fait s’extasier sans arrière-pensée sur les interprètes. Car justement, la pièce n’est que ça, une succession de fuites et d’arrières pensées.  Jean Marc Douillard

  • L’Hérault du Jour/13 avril 2011

 « Ma vie avec tout le monde » c’est le nouveau spectacle du chorégraphe François Rascalou.

« Ce matin quand j’ai appris la chute de Gbagbo, j’ai dansé », lance François Rascalou mardi. Voila qui ouvre la conversation. Le chorégraphe montpelliérain présente sa nouvelle création ce vendredi à la Chapelle. « je vois une création comme une étape. Je fais le point sur ma place dans ce métier, c’est un écho aux désirs du moment, une tentative ». Le désir est né d’un intérêt pour les danses traditionnelles et d’un article lu sur les us et coutumes de cérémonies pratiquées en Nouvelle Guinée. La tentative a été d’écrire une danse qui puisse être investie par « n’importe quelle tribu ». au final, la pièce fait un grand bon des rites ancestraux collectifs aux rituels plus individuels des gens d’aujourd’hui. Sur la forme, elle est traversée de mouvements tribaux. Sur le fond elle parle des tribus du 21e, plus factices et plus illusoires, celles qui se font et se défont sur le net. Rascalou a glané sur les tchats de divers forums, des phrases tout azimut, de vrais ou faux extraits de vie que leurs auteurs partagent avec tout le monde. « J’ai récolté des choses graves et futiles. Des remarques, des désirs, des lubies, des joies, des identités multiples, des amitiés connectées et comptabilisées, des rencontres surf, des solitudes aux bouts des souris ». C’est avec ce matériau que cinq danseurs vont investir une partition ludique à l’image des jeux de rôles engagés sur le Net. Des êtres de chair vont offrir des visions des relations virtuelles qui se nouent entre les écrans, tendance en vogue et sujet qui interpellent les artistes. « ma vie avec tout le monde », le titre de la 7eme création de François Rascalou est bien trouvé. Anne Leray

  • La Gazette de Montpellier / 14 avril 2011

La toute dernière prestation de François Rascalou avait marqué : c’était le Bal de clôture de la ZAT d’Antigone ou il excellait en maître de cérémonie travesti. La Chapelle, ou il est artiste associé, présent vendredi sa septième création : Ma vie avec tout le monde. Cet ancien danseur de la Cie Taffanel qui a fondé sa propre compagnie en 2007 s’est longtemps baladé sur le Net de forums en tchats, constaté toutes « les envies, les désespoirs, les questions » qui y sont déposés. Et cette phrase partout glanée : « je suis là pour me faire un maximum de potes ». les cinq danseurs de <Ma vie avec tout le monde vont donner corps à ces aspirations virtuelles et à cette maladresse particulière qui inspire tant le chorégraphe. Une observation enrichie du rapprochement avec un autre monde de faux-semblants : celui de la scène.       Valérie Hernandez

Les insertions poétiques / Sensiblement ensemble en aveugles

           les insertions poétiques sont des performances in situ, avec les gens, sensibles et graphiques, à vivre et voir. dérégulations du temps et de l’espace, fabrications de liens et d’images, décalages des perspectives et des sens.

ici, privation de la vision pour un parcours en ville en aveugle sans assistance.

presse Déclassé X

  • L’Hérault du jour – mercredi 19 novembre 2008         Montpellier Danse. F. Rascalou a présenté « Déclassé X » à la Chapelle.

Héros, Eros et petite mort. Le premier mot qui vient à la bouche est « beau ». C’est plutôt rare et ce n’est pas une tare. Les deux danseurs Déborah Pairetti et Yann Cardin sont le cœur battant de la nouvelle création de François Rascalou. Présentée à la Chapelle Gély, « Déclassé X » a pour trame le moment charnière de la première fois.           De la même façon qu’un jeune comédien investit avec émotion le centre d’un plateau, les corps s’exposent sur l’avant scène. Il y a des frissons, des tensions, des élans, il y a de la timidité, de la fragilité, de la candeur. Ce couple – de danseurs, d’enfants, d’ados, de héros – alterne solo et duo, évolue entre page de solitude et union, arpente l’espace, se cherche, se défie, puis tente la complémentarité.        « C’est comment qu’on fait ? » les mots simples et direct d’Emmanuel Darley évoquent la chose. Ils sont chuchotés par les danseurs et souvent adressés au public, ils sont aussi sobrement projetés sur un mur. Il y a les gestes balbutiants des jeunes néophytes associés à la gestuelle emphatique et codifiée de la tragédie et à la musique de Wagner, presque diffusée en sourdine. Il y a la maladresse de deux adolescents anonymes qui se heurtent à la stature de héros mythiques : Tristan et Iseult, Il y a aussi des moments burlesques.       Rascalou mêle la crudité sans fard du réel au lyrisme musical et romanesque. Le mariage de ces registres et de ces postures engendre une pièce singulière. La théâtralisation et l’expressivité des deux interprètes participent de la réussite de la proposition.

Acte érotique, la pièce s’achève dans un trépas symétrique : elle meurt et il reste, il meurt et elle reste. Petite mort ou ultime disparition ? « Déclassé X » est une création délicate et sensible, une histoire humaine qui se traverse en douceur, ou rien n’est jamais en force. Variation en duo sur l’amour, elle aborde la sexualité sans dévêtir les corps, et porte bien son titre.  Anne Leray

  • Midi Libre Samedi 15 novembre 2008-11-23    

    On a vu Danse : Rascalou, un déclassé romantique.

Modeste dans ses intentions, fragile comme une première œuvre qui affiche sa naïveté (plutôt que de paraître), Déclassé X, la dernière création du chorégraphe montpelliérain François Rascalou, a montré que plus de vingt-cinq ans de danse à Montpellier ont laissé des traces. Intéressantes. Rascalou, qui signait, avec ce duo romantique de très jeunes danseurs (Déborah Pairetti et Yann Cardin), sa première chorégraphie importante depuis la fondation de sa compagnie en 2007, a révélé un tempérament attachant, en tout cas désireux de sortir, sans perdre sa générosité, des sentiers usuellement battus. Inspiré, même de très loin, par le Libido Sciendi de Pascal Rambert, présenté en juillet dernier au studio Bagouet, Rascalou a poussé les deux interprètes à vivre l’envers de cette pièce érotique. Se laisser aller au romantisme d’une première nuit à deux, fléchir sans s’atteindre vraiment, sonder sa solitude à l’épreuve d’une sexualité qui détonne, ou talonne. Figures animales, pour dire cela, angles aigus ou frémissement d’instinct. Un joli moment où le couple, affronte, en un pseudo hip-hop bercé par Richard Wagner, des picotements de désirs infantiles.

Composition un peu brouillonne, cela dit, texte d’Emmanuel Darley projeté sur le coté et pas suffisamment intégré au spectacle, mais tentation clownesque à développer davantage. Donnée deux soirs à la Chapelle, en plein cœur de la cité Gély, la pièce était soutenue par Montpellier Danse, dont la deuxième coproduction avec Etienne Schawrcz, directeur des lieux, tombe au bon moment pour accompagner dans un espace au look très seventies, le regain d’utopie des années pop.                     Lise Ott

  • Webzine Danse à Montpellier 13 novembre 2008

Rascalou à la Chapelle.
La réponse à la question “y aller ?” est oui.
Il s’agit d’une pièce très délicate et de ce fait savoureuse. Son nom ? “Déclassé X”.

François Rascalou a surtout mené sa vie comme danseur de la Compagnie Taffanel. Celle-ci a coutume de dire que pour devenir vraiment chorégraphe, il faut déjà avoir mené en tant que tel, 8 pièces à bout. et là, on commence à voir….Je n’ai jamais vraiment su s’il s’agissait d’une boutade, si le chiffre de 8 avait quelque chose de symbolique, s’il provenait d’une étude détaillée… Mais l’idée est à retenir. Pour être vraiment jugé comme chorégraphe, il faut que la personne considérée ait déjà fait pas mal de pièces.
Pour François Rascalou, on a senti le mûrissement venir, voila disons deux ans, avec la série « Labyrinthe des désirs » . Les 3 pièces présentées à la suite avaient des aspects critiquables, notamment quant à un investissement affectif très disparate des différents danseurs. Mais dans le style cool proposé, où la musique a une importance considérable, certains moments, certaines ambiances étaient appréciables et la danseuse Déborah Pairetti sortait vraiment du lot, amenant à des sommets.
Là, avec “Déclassé X” (dans le cadre de la programmation “Montpellier-danse”), il y a de nouveau un progrès. On va vers une “fixation” de quelque chose qui s’apparente à un style.
La pièce est un duo amoureux, je vais essayer d’en parler un peu plus loin.
Avant, je voudrais parler du style, ou si l’on préfère de la “personnalité” de Rascalou-chorégraphe.
Bouclons l’histoire de l’importance des apports extérieurs en deux mots. La danse de Rascalou est un élément des pièces. La musique, l’éclairage, la dramaturgie (amenée en général par l’espace scénique – ici par la projection d’un texte de Darley) sont des éléments FONDAMENTAUX, ils sont premiers dans les pièces. (De ce point de vue, dans mes définitions perso, Rascalou est un “classique”).
Ceci n’a rien d’original. Ce qui caractérise vraiment Rascalou, c’est quelque chose de “cool”. C’est indéfinissable et quelqu’un m’a suggéré “peintre du dimanche”. Oui, si l’on ne le prend pas du coté péjoratif. Il s’amuse avant tout, il le prend cool, je ne sais pas le dire autrement.
C’est un parfum des prés, ce n’est pas chargé, il n’y aucun pathos. Et cela donne une fraîcheur délectable. Comme le terme de “peintre du dimanche” ne me plaisait pas vraiment (encore que si l’on pense à Renoir, peintre des guinguettes, cela me parle (VOIR)…), j’ai cherché. Et donc, pour qualifier Rascalou, je pense à Hugo Pratt, qui se fiche royalement de ses faiblesses techniques, pour aller à ce qu’il juge essentiel, ce qui lui permet de développer des histoires d’une durée… ben, juste celle qu’il faut à l’histoire elle-même, parfois peu (”Tango”), parfois beaucoup (”Mu”) ; l’éditeur, la norme du format, on s’en fout !
Vu l’âge de François, on ne parlera pas vraiment de “fraîcheur”. Par contre, jeunesse d’esprit, liberté d’esprit me plait bien.
Revenons à “déclassé X”. On peut insister sur le texte de Darley. Je ne m’y suis pas concentré. Je pense que l’essentiel, c’est la musique de Wagner (le “Tristan” comme on dit quand on est branché… mais il n’y pas de mal à être branché Wagner). La musique de “Tristan et Yseult” est quelque chose qui peut virer “pathos” (”le naufrage du teutonique”, ah, ah). Et là, le duo (dont Déborah Pairetti) le joue avec une grande finesse, une délicatesse qui font presque oublier la mort finale.
Or, réussir à interpréter cette musique, ce n’est pas donné à tout le monde. La scénographie et le texte de Darley sont clairement utilisés comme des “contrepoints”. Cela n’aurait pas choqué Wagner, il aimait ça. Donc, on reste dans l’esprit. Et on parle de notre période, de notre sensibilité, de nous. Bref, c’est bon, comme une bonne musique intégrée à notre temps (j’y trouve un petit coté “rock anglais”, cette capacité à sortir des chansons en prise sur l’actualité immédiate, dans l’esprit “Wedding Present”, “Smiths”, “Libertines”, etc.), mais ça ne pète pas plus haut que ça, ça reste respectueux de l’humain, des autres arts et artistes.
Il joue “facile”, la métaphore sportive me vient assez spontanément… Et devant l’injonction du surmoi : “il faut durcir le jeu”, il dit “alors je ne joue plus”. Est-ce un style, ben il me semble. En tout cas, c’est une qualité. Et je me suis bien régalé… or s’il y a un ayatollah de Wagner dans la zone, c’est bien moi !                                          Jean Marc Douillard

interview 2008 François Rascalou

 

  • Midi Libre mercredi 12 novembre 2008

Danse : François Rascalou, l’être de scène et de désir. François Rascalou

François Rascalou parle danse avec bonheur. Lumineux. A travers le geste, l’homme explore les expressions de l’âme ? La rencontre, l’amour, le désir. Ses paroles sont fluides et vives. Dans ses mots, la danse montre ce qui va au delà. Voyez un corps. D’un changement de courbure, il sera pitié ou érotisme, morbidité ou vulgarité. Exprimer c’est se positionner. « Se discipliner et se contraindre ». Par la maîtrise, l’être s’éveille à la connaissance et libère ses mouvements.

En arrivant à Montpellier, il se destine à enseigner le sport…il croise Jackie Taffanel. Natif de Lozère, François Rascalou a découvert la danse en arrivant à Montpellier. A l’époque jeune bachelier et gardien de handball, il se destinait à être prof de sport. Le sort en décide autrement. A l’Université, Rascalou croise Jackie Taffanel, qui l’entraîne dans la danse. La discipline ouvre à « d’autres préoccupations sur le corps, à d’autres relations aux autres ». Et cet art, libéré de règle, met son interprète « face au vide jouissif de la création ».

Danseur professionnel et partenaire de Taffanel les quinze années suivantes, Rascalou crée sa première compagnie en 1999 et est associé à la Chapelle depuis 2002. Sa carrière est exemplaire. Sa recherche va crescendo. Car en composant des spectacles, Rascalou prend de la distance sur l’interprétation même du geste. Si le danseur, lié à la scène, se plie à un protocole rigoureux qui rythme son ouvrage (« tenir ses heures, s’échauffer, boire une tasse de thé et s’entraîner encore »), le chorégraphe, « au seuil de l’être, vit une toute autre aventure ». Où le regard, sans cesse, interroge l’espace et l’œil imagine l’acte en écho avec le son. Musique et verbe. Dans Déclassé X, Rascalou se réfère aux grands mythes. Tristan et Iseult, Mélusine, Orphée…impossible amour, ravage de la passion. Poison et magie. Sur écran, il projette un texte d’Emmanuel Darley, l’écrivain narbonnais. Une lettre d’adolescent au sentiment bringuebalant. Dans l’évolution du chorégraphe, Déclassé X marque un temps. En relation avec la transmission et les échanges alimentés par Rascalou, entre autres, avec les collégiens de Fontcarrade.

Viendra ensuite « Qu’est ce que je fous ? Dans quoi je marche ? ». Future création en relation à un texte de Darley, d’un autre style. « Plus mature, cynique et incisif.» Entre temps, il y aura Xtaz, un spectacle de danse de nuit et électro mis en scène avec des novices. Par la danse, alchimie en mouvement de sons et d’êtres, l’onirique devient tangible.                  C.-Solveig FOL